Ils avancent à bas bruit, sournois et menaçants comme cette époque incertaine. Les morsures, multiples, n’en seront que plus terribles. Celle des guitares qui cisaillent méthodiquement l’espace, celle d’une rythmique qui tranche à vif, et cette voix convulsive, belliqueuse, qui ne lâchera le morceau qu’une fois vaincu, exsangue, au terme d’un assaut éclair. Post-punk, post-funk et post-moderne, Serpent déchiquette aussi les étiquettes, et ce premier EP sans sommation porte un nom de manifeste : Time for a rethink (Il est temps de repenser). Remise à zéro, certains parmi ces cinq assaillants étaient en recherche d’une pulsion primitive, comme on le dit du cerveau lorsqu’il ne fonctionne qu’à l’instinct. Parmi eux, on reconnaîtra Mathieu Lescop, chanteur échappé jadis d’Asyl et qui a depuis réussi l’épineuse équation d’une cold-wave française aux réchauffements pop sur deux albums (Lescop et Echo) remarquables et remarqués. En parallèle à cette voie solitaire, qu’il poursuit sans presser le pas, Mathieu Lescop cherchait à retrouver l’excitation jouissive de l’électricité, de l’écriture collective et intuitive sans cadastre et à assouvir par là des envies d’embrasements. En mai 2019, il se retrouve en salle de répétition avec son batteur habituel, Wend Kill, les deux guitaristes Martin Uslef et Adrian Edeline, le bassiste Quentin Rochas, tous issus d'un collectif de jeunes musiciens éclectiques et hyperactifs qui jouant déjà ensemble dans diverses formations, les titres jaillissent comme des fluides venimeux trop longtemps retenus. La vitesse, l’intensité, une certaine forme d’insouciance, les guident dans cette jungle sonique quelque part entre Gang Of Four, A Certain Ratio, Devo ou les Public Image Limited. Tous ont aussi en tête les répliques contemporaines de ces chocs thermiques punk-funk ou noise-cold, des Canadiens de Crack Cloud aux Anglais de Life ou HMLTD en passant par les Brooklyniens de The Rapture.
Second EP ‘Dysfunktion’ disponible (Pias/Finaliste)